Vivre et courir en altitude

Dans le prochain épisode du Camp de Base, Emilie a eu la chance de recevoir Paul Bonhomme, le guide de haute montagne qui a couru à travers les Ecrins à l’été 2022. Il nous partage sa passion pour les sports extrême en haute montagne. Ski de pentes raides ou encore *ultra-trail, ces activités pratiquées en haute altitude et dans un environnement pas toujours facile font le quotidien de Paul Bonhomme et d’autres adeptes partout dans le monde.

*L’ultra trail est un type de course à pied qui se pratique en nature (montagne), hors-route, mais sur de très longues distances et avec beaucoup de dénivelé. Un trail est considéré comme ultra lorsque la distance parcourue est supérieure à celle d’un marathon, soit supérieure à 42 km, mais cette distance dépend des organismes.

Quel est l’impact de la vie et de l’activité sportive en altitude sur notre corps ?

Altitude et pression atmosphérique : des variations opposées

Il est bien connu que lorsque l’on monte en altitude, celle-ci correspondant à l’élévation d’un point par rapport au niveau moyen de la mer, la pression atmosphérique diminue. Mais comment expliquer ce phénomène ?

La pression atmosphérique est la pression de l’air en un point. Elle peut être modélisée par une colonne d’air au-dessus de nous. Si vous êtes en basse altitude, votre colonne d’air sera grande car elle s’étendra de vous à l’atmosphère. Par contre, si vous prenez de la hauteur, la distance entre vous et l’atmosphère diminue, et votre colonne se rapetisse. De plus, la gravité de la Terre poussant les molécules d’air vers le bas, elles se font plus rare en altitude.

Donc en altitude, il y a moins d’air et moins d’espace, donc la pression atmosphérique diminue !

S’oxygéner en hauteur

Monter en altitude n’est pas un acte anodin :  au vu de la diminution de la quantité de molécules d’air au m3, les conséquences sur le corps humain se font ressentir. Le corps se retrouve en manque d’oxygène, un phénomène appelé hypoxie. Pour comprendre ce qu’est l’hypoxie et ses conséquences, il faut d’abord bien comprendre comment fonctionne l’oxygénation du corps.

Pour assurer le bon fonctionnement de notre corps et également sa survie, il nous faut environ 400L d’oxygène (O2) par jour. Cet apport conséquent en oxygène permet aux cellules de l’organisme de fonctionner correctement. Les globules rouges jouent un rôle central dans le transport de l’oxygène dans l’organisme, car l’O2 va venir se fixer sur l’hémoglobine, l’unique protéine du globule, pour ensuite être transporté dans le sang. Cette fixation de l’oxygène sur le globule rouge se fait au niveau des alvéoles des poumons. L’hémoglobine va ensuite relâcher l’oxygène pour qu’il puisse irriguer toutes les cellules du corps. En échange, le globule rouge va récupérer les déchets de la respiration cellulaire, et les ramener aux poumons pour qu’ils soient expirés. Ce processus naturel se fait à une rapidité fulgurante.

L’hypoxie : mal de l’altitude

C’est tout simplement le nom donné lorsque nous sommes en manque d’oxygène. Attention cependant, ce manque d’oxygène est dû à une diminution de l’oxygène disponible, ce qui entraîne des difficultés respiratoires, à ne pas confondre avec l’asphyxie, qui est une suspension de la respiration car il n’y a plus du tout d’oxygène, entrainant ainsi le décès.

L’hypoxie se caractérise par trois choses :

  • Les effets

Si vous allez vous balader en montagne et que vous commencez doucement à prendre de la hauteur, votre corps va se mettre sur le mode « adaptation » dans un premier temps. Comme la quantité d’oxygène disponible commence doucement à diminuer, votre respiration sera plus profonde pour essayer de capter le plus d’oxygène possible, et elle va également s’accélérer, tout comme votre rythme cardiaque.

  • Les changements physiologiques

Au fur et à mesure que l’oxygène diminue, le nombre de globules rouges dans le sang va augmenter. Ainsi, d’avantage d’oxygène sera transporté dans le corps, et donc d’avantage d’énergie. Ce processus permet de compenser ce manque. Pour que ce changement se produise, il faut se situer à environ 2000 mètres d’altitude.

  • Les symptômes

Si vous restez en hypoxie de manière prolongée, le corps va vous envoyer des signaux d’alertes. Nausées, céphalées, hyperventilation, tachycardie voire des œdème dans les cas les plus extrêmes. Pour éviter de développer ces symptômes, il est important que l’acclimatation se fasse progressivement, ainsi que l’ascension.

S’entraîner en altitude : un dopage naturel ?

Comme nous l’avons vu plus haut, le corps arrive à s’adapter à un manque d’oxygène en produisant plus de globules rouges pour transporter plus d’oxygène dans le corps. Ce « coup de pouce » de notre corps, qui reste en fait un système d’adaptation, se trouve être un bon moyen d’augmenter ses performances sportives.

Sujet qui fait encore débat, l’augmentation de la quantité de globules rouges serait bénéfique car cela améliorerait les phases de repos et boosterait la puissance musculaire en plus du transport de l’oxygène. Mais ce n’est pas tout. Cela favoriserait également la création d’une hormone, l’EPO (l’Érythropoïétine), une hormone naturelle sécrétée par le corps dans des conditions d’hypoxie, et utilisée comme dopant dans certains dérivés. Il est a noté que les EPO de synthèse (les dopants) sont interdits.

Cette technique d’entraînement en altitude serait bénéfique pour les pratiquants de sports d’endurance comme la course, ou encore le ski. En effet, un muscle bien oxygéné est un muscle performant et endurant car l’oxygène facilite l’utilisation des graisses et des sucres (l’énergie) par les muscles. Elle permet d’éviter la fatigue musculaire. Attention cependant, dans les cas les plus graves, une quantité trop importante de globules rouges dans le sang (polyglobulie) peut augmenter la viscosité du sang, rendant difficile la circulation de celui-ci dans les petits vaisseaux.

Triche ou simple petit boost, cette pratique demande toutefois de la prudence : tout le monde ne supporte par l’altitude et l’hypoxie, et trop d’altitude produit des effets totalement inverses.

Conclusion 

Vivre et pratiquer du sport en altitude, c’est finalement un mode de vie qui nécessite une grande capacité d’adaptation. Il faut laisser le temps à son corps de s’acclimater aux changements de pression et de quantité d’oxygène pour éviter les effets néfastes.

Article écrit par Justine Facchin, relu et corrigé par Emilie





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